1870-1871, de Champigny à Paris…
« Avec le temps, notre œuvre trouvera des applications de tous genres et des développements aussi précieux qu’inattendus »
Ainsi se prononçait Henry Dunant le 25 mai 1864 lors de la réunion de constitution de la Croix-Rouge française, sous le nom de Société de secours aux blessés militaires (SSBM). Deux autres sociétés viendront s’associer à son action : l’Association des dames françaises (ADF) en 1879, et l’Union des femmes de France (UFF) en 1881.
C’est a l’occasion du conflit de 1870 que les premières ambulances Croix-Rouge entreront en action.
Les docteurs BITTERLIN (médecin à Saint-Maur-des-Fossés) et DUPERTUIS (médecin à Chennevières-sur-Marne) seront à l’origine de l’ouverture des premiers hôpitaux » Croix-Rouge « , soignent et évacuent les blessés aux côtés des Frères de la Doctrine chrétienne mandatés par la Croix Rouge.
La délégation territoriale du Val-de-Marne rendra hommage à ces deux personnalités tout au long de l’année 2021.
Docteur BITTERLIN
Ce mercredi 2 décembre 2020, une cérémonie de commémoration du 150ème anniversaire de la bataille s’est déroulée en présence de personnalités civiles et militaires et de la Croix-Rouge française.
La présence d’Henry DUNANT à Paris en 1870.
Le 16 septembre 1870, les troupes prussiennes traversaient la Seine et encerclaient Paris.
Cinq jours plus tard, Henry Dunant fondait l’Association Française de Prévoyance (AFP) destinée à compléter l’oeuvre de la Croix-Rouge en améliorant le sort des populations sous les armes.
Dans un manifeste, tire a Cent mille exemplaires, Henry Dunant lance un Appel aux Prussiens et définit le but de cette nouvelle organisation :
«Elever le niveau moral et intellectuel des citoyens appelés sous les drapeaux, développer chez eux le goût de l’instruction, des occupations utiles et même des arts… instruire, moraliser, humaniser le jeune citoyen oblige de porter les armes ; réveiller, développer chez lui tout ce qui tend a. relever et a ennoblir le caractère, voila le but qu’il faut atteindre. C’est une forme nouvelle de protestation contre les haines nationales…»
Pendant toute la durée du siège, l’Association va s’efforcer d’atténuer les souffrances des militaires comme des civils. Elle commence par distribuer aux soldats des forts et aux gardes mobiles de la capitale des milliers de «cartouches de pansement» contenant une bande de toile et de la charpie au perchlorure de fer destinée à arrêter les hémorragies. Le soldat pouvait panser ses propres plaies ou panser facilement un de ses camarades blessés.
L’Association, sur l’initiative d’Henry Dunant, décide ensuite de confectionner des rondelles de parchemin pour servir de pièces d’identité. Destinées à être suspendues au cou, ces rondelles doivent porter le nom, le prénom, le lieu de naissance ainsi que l’incorporation de chaque homme (la première plaque d’identification est née).
En décembre 1870, Henry Dunant crée une « commission des vêtements chauds. Le salon de l’hôtel occupe par l’Association au 2, rue Cambaceres, devient vite trop petit. Henry Dunant obtient les appartements de la grande aumônerie, rue de Rivoli, en face des Tuileries.
Tous les jours, en se rendant a son annexe, il voit flotter sur le toit du Palais impérial un grand drapeau blanc orne de la croix rouge.
II a raconte dans un fragment de Mémoires quelles furent les souffrances des défenseurs de Paris :
» Pendant le siège, au mois de décembre 1870, dans le fort de Bondy, au Drancy, presque tous les hommes du corps qui l’occupait étaient de service dans les tranchées et n’avaient par conséquent aucun abri. La plupart se trouvaient sans chaussettes, ne possédaient que de très mauvais souliers, des capotes et des pantalons usés par le service depuis plusieurs mois, des guêtres de cuir qui prenaient l’humidité et point de tricots « .
La nuit du 22 au 23 décembre marquait -14 degrés de froid.
» L’état des choses était pire qu’en Crimée, ou les soldats étaient pourvus de longs bas de laine allant jusqu’au genou, ou ils avaient des sabots, des guêtres bulgares montantes en drap. En Crimée, durant une partie du premier et lors du deuxième hiver, les français possédaient de grandes tentes turques qui les abritaient presque aussi bien qu’eussent pu le faire des baraquements. Autour de Paris, ils n’avaient que de petites tentes et à Champigny, par exemple, ils n’avaient pas même leur demi-couverture... »
Grace aux efforts de Dunant, des vêtements chauds furent fournis a des milliers de soldats cruellement éprouvés par l’extreme rigueur de la saison. En ce même mois de décembre, Henry Dunant sollicita l’autorisation de visiter les prisonniers de guerre allemands internes a Paris.
Mais tant le ministère de la Guerre que celui des Affaires étrangères lui refusèrent cette permission. Toujours en avance sur son temps, le promoteur de la Convention de Genève ne pouvait vaincre toutes les réticences.
On peut suivre les progrès du siège à travers la correspondance d’Henry Dunant avec sa famille. Depuis le mois de septembre, il ne cesse d’envoyer, par ballon, des messages aux siens, messages qui ont été fort heureusement conservés.
Le 3 décembre 1870, par exemple, il écrit :« Je suis parfaitement bien portant et je ne mange ni chats ni rats, quoique l’on dise que les rats se vendent 2 francs pièce et que l’on en fait d’excellents pâtés. On s’est régale des animaux du Jardin des Plantes et de ceux qui restaient du Jardin d’acclimatation. Ces trois jours ont été remarquables par la masse des blessés qu’on transporte sur les bateaux de la Seine et a bras dans les rues. Je m’occupe spécialement des blessés et prisonniers allemands et prussiens, et je leur fais donner tous les soins désirables… »
Le 28 Janvier 1871, Paris capitule ; une Assemblée nationale réunie a Bordeaux vote les préliminaires de paix et la déchéance de l’Empire. La garde nationale refuse de se soumettre au nouveau gouvernement et décrète l’insurrection. C’est la Commune…
Bernard Gagnebin Conservateur des manuscrits de la bibliothèque publique et universitaire de Genève.
Tableau N°1 : Édouard Detaille